CAMPAGNE
D'ITALIE (12 Novembre I9I7 - 21 Février 1919)
(Le Piave)
Le
12 novembre 1917, le XIIe Corps d'Armée reçoit l'ordre de départ pour L'Italie.
L'armée italienne vient d'être battue à Caporetto
et le haut commandement allié a décidé d'envoyer à son secours de puissants
renforts.
Le 138e s'embarque en gare de Dormans les 14 et 15 novembre. Il fait
en auto le trajet de Vintimille
à San dal Mazzo du
Tende, où il prend le train militaire italien qui le débarque à Decenzano sur les
bords du lac de Garde les 20 et
21 novembre. Par étapes le Régiment gagne successivement Vérone, Vicence et Isola di Malo (le 10 décembre 1917). La
Division est en position d'arrêt prête à agir contre-offensivement
dans le cas où un fléchissement se produirait sur le plateau d'Asiago.
Page du journal tenu par le soldat MICHAUD lors du transfère du 138ème en Italie. Un grand merci à M.Champomier pour ce don magnifique.
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Le 25 janvier, le Régiment se dirige de Isola di Malo vers Asolo où il relève le 341e et occupe
les pentes est du mont Tomba — qui
vient d'être repris par les Français — et les bords du Piave entre Pederroba
et Onigo.
Le 28 février, une reconnaissance offensive
audacieuse est effectué sur la rive gauche du Piave par la 5e Cie (capitaine MONIER et lieutenant POURET). Au moyen
de barques jumelées formant portière, cinquante hommes traversent le Piave. Le groupe d'exécution rencontre
une patrouille autrichienne, l'attaque résolument et la met en fuite en capturant
deux prisonniers.
Le 12 mars, relève par le 7e régiment d'infanterie
italien: le Régiment arrive le 22 mars dans la région sud de Vicence, à Ponte di Mossano, Villaga, Ponte di Barbarano.
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Médaille
accordée aux soldats français ayants combattu en Italie. |
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Et
son diplôme. (Mars 1918) |
Le 26 avril, la 23e Division reçoit l'ordre
de relever la 24e Division dans le secteur d'Asiago. Le 29, la relève du 108e par le 138e est terminée. Le Régiment
occupe le sous-secteur de Monte Sprunck entre le val
Barenthal et le val de Turcio Tuzella.
Il y exécute d'importants travaux. Toutes les nuits, se déroulent de violents
combats de patrouille.
Secteur
d'Asiago. Sans indications. |
Le bombardement est intense; le lieutenant
BALENCIE, de la 5e Cie est tué le 18 juin.
Le 21 juin, les attaques autrichiennes cessent
sur tout le front : l'ennemi a perdu la bataille.
Le 24 juillet 1918 on vaccine une partie des soldats du 138ème. Fortes fièvres en perspective! |
Du 12 au 29 août, le Régiment occupe le sous-secteur
de Monte Sprunck,
du 12 au 27 septembre, celui du Monte
Nasacima Echar.
La Cima
Echar le 7 septembre 1918 vue à 3800 mètre d'altitude. |
L'opération admirablement menée permet de ramener
105 prisonniers dont 4 officiers et 5 mitrailleuses. Elle nous a coûté 2 morts
et 11 blessés. Les 2e et 3e Cies sont citées à l'ordre du Corps d'Armée.
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Carte du 5 octobre 1918. |
Le 27 septembre, le Régiment, relevé, descend
dans
La 12e Armée, commandée par le général GRAZIANI
doit attaquer à cheval sur le Piave
en direction générale de Feltre-Mel.
Font
partie de la 12e Armée:
Le 1er C. A. italien attaquant à l'ouest du
Piave. La 23e Division française et la
52e Division italienne attaquant à l'est du Piave.
L'idée de manœuvre de la 23e D. I. est la suivante:
Un Régiment, le 107e, a pour mission
d'organiser une tête de pont.
Un Régiment, le 138e, a pour mission de s'emparer
du Pianarpello.
Cet objectif atteint, le 78e R. I, en liaison
avec le 138e, doit progresser, dans la conque de Ségusino et sur les pentes ouest
du Monte Balcon.
Les premières attaques italiennes ayant échoué,
c'est, seulement dans la nuit du 26 au 27 octobre que le 107e passe le Piave. Le 138e rassemblé dans Pédérobba est soumis
à un bombardement d'une extrême violence. Les ponts ayant été coupés, le Régiment
ne peut passer le Piave au matin du 27.
Le 107e après un dur combat parvient seulement
à s'accrocher au rebord ouest, de la falaise et repousse des contre-attaques.
Il ne réussit pas à déboucher de la falaise.
Le 28, à l'aube, le 138e passe le Piave sur les ponts hâtivement reconstruit,
et malgré un bombardement intense. Il franchit un bras secondaire avec de
l'eau jusqu'aux genoux.
Ce qu'il faut à tout prix, c'est conquérir
la tête de pont à l'abri de laquelle les autres forces alliées pourront passer
le Piave et se déployer pour l'assaut.
Les
trois bataillons accolés et échelonnés chacun en profondeur attaquent à 11h20
après une préparation d'artillerie de vingt minute. Minutes grandioses que
celle où les vaillants soldats du 138e franchissent le rebord de la falaise
pour se porter à l'attaque. Le terrain est dur, entrecoupé de ravins profonds
abritant les réserves. Les glacis sont battus par des feux rasants de mitrailleuses
servies par les officiers autrichiens.
De toutes parts, les mitrailleuses crépitent.
A droite les Italiens n'ayant pas déclanché leur attaque, les mitrailleuses
ennemies de la Montagnola couchent les premières vagues de la 2e Cie (Cie
SAUTS). Mais rien n'arrête l'élan de nos troupes. Une unité est-elle arrêtée,
aussitôt l'unité voisine qui a réussi à progresser vient l'aider par
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Médaille
d'or offerte aux régiments combattants en Italie. |
A gauche, le bataillon ROUSSEAU s'est emparé
sans coup férir du village de San-Vito; dépassant son objectif il s'établit sur les pentes
du Monte-Cei.
Au centre, le bataillon DE CUSSAC, enlève magnifiquement
la Madona di Caravaggio
et
A droite, le bataillon BEAUMONT s'empare de
haute lutte du village de Fener et, par une manœuvre audacieuse, fait tomber Casa di Roer.
Pour boucher le trou qui existe entre sa droite et les Italiens qui n'ont
pas encore bougé, des unités de la compagnie de réserve sont poussées dans
la direction de San Giovanni et
s'en emparent.
Une demande pressante est faite auprès des
Italiens par l'intermédiaire du colonel commandant le 107e, afin que ceux-ci
profitent des avantages obtenus par le 138e et concourent à la manœuvre commencée
pour faire tomber la Montagnola.
L'ennemi d'ailleurs semble céder. Pour maintenir
le contact, chaque unité, dépassant les objectifs assignés, lance au-delà
des patrouilles de contact. La tête de pont est conquise. Plus d'un millier
de prisonniers sont déjà décomptes. Le butin est considérable.
La situation étant jugée favorable, le lieutenant-colonel
BAYLE commandant le 138e demande à attaquer immédiatement les monts du Piannar et du Perlo. Les bataillons
ROUSSEAU et DE CUSSAC sont chargés de cette mission, et dans la matinée du
29, ils s'emparent de ces deux têtes dans un élan magnifique. Le caporal Léon
MANSIER, de la 9e Cie se signale par son audace en montant un des premiers
au sommet d'un piton formidablement défendu en s'emparant d'une mitrailleuse
dont il tue le servant. Le lieutenant RATINAUD est tué. Mais les prisonniers
affluent par centaines, de nombreux canons sont pris à l'ennemi dont les contre-attaques
sont repoussées.
Derrière nous, le 78° régiment d'infanterie
et de nombreuses troupes italiennes traversent le Piave. La trouée s'élargit, le succès s'annonce.
Dans la nuit du 29 au 30 octobre, le 78° R.I.
appuyé à sa droite par le bataillon BEAUMONT, attaque en direction de Segusino, pendant
qu'à notre gauche, le 1er Corps d'Armée Italien ayant réussi à déboucher,
progresse à l'ouest du Piave. A
notre droite, les Anglais ont fait eux aussi une large brèche et progressent
dans la direction de Porderonne,
afin de couper la retraite aux unités autrichiennes en déroute.
Pipe prise sur un soldat autrichien. |
Le 31 octobre, la victoire s'annonce complète;
le 138e pousse en direction de Feitre, franchissant au prix d'un
effort prodigieux, la haute cime du Monte
Zogo. Le 1er novembre, la poursuite est arrêtée.
Les Autrichiens acculés à la barrière montagneuse, sans route vers le
nord, sont contraints à la reddition. En trois jours de bataille, le Régiment avait
fait 100 officiers et 2.200 hommes de troupe prisonniers. Il s'était
emparé d'un butin considérable : Plus de 100 mitrailleuses, 29 canons, 11 minenwerfers,
d'innombrables dépôts de munitions. Le 4 à quinze heures, les hostilités cessent
contre les forces austro-Hongroises. Les 5 et 6 novembre, le Régiment fait mouvement
et va cantonner dans la région de San-Vito. Le 11, des radios (T. S. F.) annoncent, que
le matin, l'armistice a été signé en France
par le maréchal FOCH et les plénipotentiaires allemands. Le 6 décembre, au cours de la revue des troupes
françaises en Italie, passée
par le roi d'Italie, à Castelio di Codego, le
général GRAZIANI épingle la Croix de guerre au drapeau du Régiment.
Les vertus guerrières dont le 138e a fait preuve sont consacrées par
la magnifique citation à l'Ordre de l'Armée dont voici le texte : |
Au cours de ces opérations a fait plus de 2.000 prisonniers
dont de nombreux officiers, pris de nombreux canons, des mitrailleuses et
un matériel considérable.
Ce
diplôme est accordé à chaque soldat présent
dans le régiment au moment de l'action. |
La guerre est finie en Italie. il va falloir retouver les tranchées de France. "Le Matin" 4 novembre 1918. |
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